« CHANGER LE REGARD SUR LE GRAND ÂGE »

Secrétaire d’Etat en charge de la Famille, des Personnes âgées et de l’Autonomie dans le gouvernement Valls, Laurence Rossignol portera le projet de loi sur l’adaptation de la société au vieillissement devant le Parlement.

La loi sur l’adadptation de la société au vieillissement devrait être votée avant la fin de l’année. Quels sont les principaux objectifs de ce texte ?

Cette loi, très attendue des Français et issue d’une large concertation, porte une vision sociétale. Il s’agit de changer les représentations sur le grand âge, de contribuer à améliorer le quotidien des familles confrontées à la perte d’autonomie et d’apporter davantage de justice sociale et d’égalité sur les territoires.
Pour travailler dans cette direction, et je l’ai dit dès ma nomination, début avril, je veux donner du sens à la solidarité entre générations, de la petite enfance à la vieillesse. Je reprendrai ici l’image qui illustre ma vision de la famille : un immeuble avec une génération à chaque étage et dans les escaliers, en grande majorité, des femmes qui montent et qui descendent en permanence. Mon objectif est clair : faciliter cette
circulation au sein de l’immeuble et mon portefeuille réunissant la famille et les personnes âgées est une force pour y arriver. Je suis par ailleurs personnellement très attachée à défendre les actions de prévention. La cohérence avec la stratégie nationale de santé prendra ici toute sa dimension.

En quoi les gérontechnologies et la « Silver Economie » peuvent-DRelles contribuer à une meilleure prise en charge de la dépendance ?

J’en suis convaincue : relever le défi de la transition démographique nécessite de créer un écosystème favorable à l’innovation et au déploiement des nouvelles technologies. La Silver Economie doit être un facilitateur dans la réalisation de plusieurs objectifs de la loi.
N’oublions pas que les usages des nouvelles technologies par les personnes âgées vont évoluer très vite. L’enjeu est donc, à mon sens, de favoriser leur installation et surtout leur utilisation bien en amont de la perte d’autonomie. Ce n’est pas au moment d’un retour à domicile après une chute et une hospitalisation qu’il faut adapter le logement ou proposer de la téléassistance. La personne se trouve déjà en situation de fragilité. Lui expliquer à ce moment-là que le tapis auquel elle tenait particulièrement est à proscrire ou comment utiliser sa nouvelle tablette n’a aucun sens !
Il me paraît donc essentiel de poursuivre la promotion de la Silver Economie et le déploiement des innovations technologiques, tout en veillant à leur usage, à l’éthique, et de développer une approche globale. La complémentarité entre les aides humaines indispensables et les aides techniques en développement doit être mise au profit d’un même objectif : celui de renforcer le lien social dans notre société, dont je suis convaincue que sa transition post-individualiste est amorcée. On en revient à l’immeuble !

Quels engagements prend le gouvernement pour développer et faciliter le maintien à domicile des personnes âgées ?

L’accompagnement à domicile est une dimension essentielle de la loi. Si je peux résumer l’action du gouvernement pour favoriser le domicile, je relèverais 5 points :

  • Un logement adapté et des gérontechnologies utiles.
  • Une accessibilité financière et géographique aux prestations.
  • Un entourage présent et soutenu.
  • Des services de prévention, d’aide et de soins à domicile rénovés.
  • Une information grand public sur l’offre existante.

Les efforts demandés à nos concitoyens, et notamment aux retraités, doivent se retrouver dans des mesures redistributives de solidarité. Pour l’aide personnalisée à l’autonomie (APA), par exemple, les plafonds d’aide vont être revalorisés et la contribution financière demandée aux personnes, le fameux « reste à charge », sera réduit. Très concrètement, ces dispositions vont permettre à 600 000 des 730 000 bénéficiaires de l’APA à domicile d’être gagnants [une heure d’aide à domicile par jour en plus pour les personnes les plus dépendantes] et il n’y aura aucun perdant.
L’engagement du gouvernement se tourne aussi vers les services d’aide à domicile intervenant auprès des personnes fragilisées qui sont aujourd’hui dans une situation économique très difficile, avec des impacts sur l’emploi local parfois importants. Sans attendre la loi, des mesures financières de soutien aux restructurations sont mobilisées depuis 2012 à hauteur de 130 millions d’euros. Il faut maintenant aller plus loin dans la refondation du modèle économique et organisationnel de ces structures.

Propos recueillis par Pierre Mongis