
Anne-Sophie Joly Présidente du CNAO
Les premiers états généraux de l’Obésité, que nous venons d’organiser au ministère de la Santé, l’ont mis en lumière : l’obésité est devenue une priorité impérieuse de santé publique. Aujourd’hui, elle concerne 18 % des Français et pourrait toucher 30 % de la population en 2030. Ses effets sur la santé sont considérables, avec 19 maladies associées, dont le diabète, les pathologies cardio-vasculaires, l’insuffisance rénale, mais aussi l’apnée du sommeil et certaines formes de cancers. Ses retentissements sur la santé mentale sont également majeurs en termes de dépression, d’anxiété et de repli social. L’obésité isole, elle éloigne du lien social et du monde du travail. A défaut d’être enseignée à la faculté, elle expose le patient à de nombreuses complications, à l’errance médicale, en réduisant son espérance de vie. Aujourd’hui, il faut que les autorités, au plus haut niveau, franchissent enfin le pas, en reconnaissant l’obésité comme une maladie à part entière et en l’inscrivant, pour certains d’entre nous, parmi les affections de longue durée (ALD), ouvrant droit au remboursement à 100 %. Très élevé, le coût quotidien pour se soigner empêche les plus défavorisés d’accéder au soin, accentuant le gradiant social lié à la maladie.
Au-delà, nous appelons à ce que l’obésité soit désignée comme Grande Cause nationale 2026. Cela permettrait de mobiliser l’ensemble de la société contre les représentations stigmatisantes du surpoids. Il faut par ailleurs agir sur l’alimentation, sa transformation, son marketing, sa communication, en pénalisant les pratiques d’ultratransformation de l’industrie agroalimentaire si rien n’est fait. Le Nutri-Score doit être rendu obligatoire, de même qu’il faut interdire les fast-foods à proximité des établissements scolaires et la distribution de barres chocolatées dans les écoles. Sur le plan du soin, les personnes en situation d’obésité doivent être égales en termes d’accès aux soins ; elles doivent pouvoir accéder à des scans, des tensiomètres et des tables d’examen adaptés à leur morphologie. Plus que tout, nous demandons que le respect de la différence, le bien-être, la santé et la promotion de la bienveillance soient au cœur des actions menées en faveur de la lutte contre l’obésité. Les Français doivent comprendre qu’il nous faut préserver nos enfants, notre population et qu’aucun d’entre nous n’a choisi d’être gros (sse).
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Obésité réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 5 mars 2025.