Le 22 septembre, à l’occasion de sa première interview, Michel Barnier a annoncé sur France 2 que la santé mentale deviendrait la Grande Cause nationale pour 2025. Un aboutissement pour les nombreux acteurs de la santé mentale, qui portaient la demande depuis octobre 2023, à travers un manifeste regroupant plus de 3 000 organisations.
Le sujet était déjà, au menu du gouvernement Attal. Et la santé mentale devait faire l’objet de travaux cet été dans le cadre du Conseil national de la Refondation, avant d’être annulés pour cause de vacance gouvernementale. De fait, depuis le Covid-19, on assiste à une forte dégradation de la santé mentale des Français. Chaque année, 13 millions de personnes, soit 1 Français sur 5, développe un trouble psychique (dépression, troubles anxieux, alimentaires, bipolaires, schizophréniques…), selon le collectif Santé mentale Grande Cause nationale 2025. Entre 2019 et 2023, les tentatives de suicide ont doublé chez les 18-25 ans. Et les professionnels estiment que 1 personne sur 3 sera victime d’un trouble mental durant son existence.
[…] Outre les conséquences médicales directes, les troubles psychiques fragilisent la société sur de nombreux plans.
Angèle Malâtre-Lansac
Agir au-delà des intentions
« L’engagement du Premier Ministre est une excellente nouvelle, mais il faudra qu’il soit suivi de décisions politiques fortes, avec l’ambition de traiter l’ensemble des besoins, en termes d’information, de prévention, de déstigmatisation des troubles psychiques, mais également de soutien à la recherche et à la psychiatrie », souligne Angèle Malâtre-Lansac, Déléguée générale de l’Alliance pour la Santé mentale. Avec le collectif Santé mentale Grande Cause nationale 2025, l’Alliance pour la Santé mentale se mobilise pour sensibiliser l’ensemble de la société. « La santé mentale ne doit plus être taboue, c’est l’affaire de tous, précise Angèle Malâtre-Lansac. Outre les conséquences médicales directes, les troubles psychiques fragilisent la société sur de nombreux plans. » Les jeunes sont particulièrement touchés : 75 % de ces troubles surviennent avant l’âge de 24 ans et 40 % des étudiants présentent des symptômes dépressifs. Avec 23 milliards d’euros, c’est le premier poste de dépenses annuelles de la Sécurité sociale et on évalue à 163 milliards d’euros les coûts directs et indirects liés aux troubles psychiques.
Graduer les prises en charge
Comment mieux agir, alors que l’offre de soins n’est pas à la hauteur des besoins ?
« Il faut mettre en œuvre une prise en charge graduée, avec une meilleure information du grand public, de la prévention, une réponse médicale de proximité pour les troubles mentaux les plus fréquents, et enfin une expertise de deuxième et troisième recours pour les troubles les plus complexes », préconise Angèle Malâtre-Lansac.
Autre impératif, il faut davantage soutenir la recherche.
« Grâce aux progrès scientifiques récents, notamment dans la biologie et la génétique, nous entrons dans l’ère de la psychiatrie de précision. Prescrire et délivrer le bon traitement, pour le bon patient et au bon moment, c’est désormais la voie d’avenir pour changer le pronostic de nombreuses maladies psychiatriques », conclut-elle.
Antoine Combier
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Santé Mentale réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 11 octobre 2024.