
Dr Luc Ceugnart, radiologue, président de la Société française de Sénologie et de Pathologie mammaire (SFSPM).
Si le dépistage du cancer du sein n’est pas encore personnalisé, il le sera à l’avenir, notamment en fonction des résultats de l’essai européen MyPeBS (My Personal Breast cancer Screening). De même, l’IA, outre son assistance à la détection lors de la seconde lecture des mammographies du dépistage organisé, pourrait aider à prédire le risque individuel des femmes. La personnalisation est aussi présente dans les stratégies thérapeutiques. Elle peut occasionner une désescalade thérapeutique, comme avec les signatures génomiques qui concernent 10 % des femmes et permettent de cibler celles pouvant bénéficier d’une chimiothérapie.
A l’inverse, la personnalisation va « alourdir » certaines prises en charge comme dans les tumeurs triple négatif, avec l’immunothérapie qui permet des gains en survie considérables, rendant le pronostic de ce type de cancers moins péjoratif. Cependant, ce progrès s’accompagne, hélas, de complications parfois complexes à gérer. De leur côté, les inhibiteurs de cycline CDK4/6, traitement adjuvant ciblé dans les cancers hormonodépendants, ont également permis une nette amélioration de la survie globale. Au-delà de la tolérance, ces traitements chroniques soulèvent la problématique de l’observance qui doit aussi être surveillée au cas par cas. La personnalisation des prises en charge repose également sur le niveau de risque de chaque femme, parfois difficile à évaluer.
Pour établir les meilleures stratégies, des réunions de concertation pluridisciplinaires (RCP) « Femmes à risque » ont été mises en place. La surveillance, elle aussi, pourrait être individualisée, espacée dans certains cas. Une étude anglaise montre que cela n’a pas d’impact sur le devenir des patientes, mais pourrait libérer du temps pour les médecins, notamment pour le dépistage qui est un levier incontestable d’amélioration de la survie. En effet, la participation au dépistage augmente de 20 points la survie des femmes y prenant part. Tout au long du parcours de soins, la personnalisation est donc le maître-mot face à un terme unique qui caractérise en fait des maladies multiples et les problématiques uniques de chaque femme.
Gézabelle Hauray
Photo © SFSPM / DR
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Cancer du Sein réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 4 octobre 2025