Les enjeux pour mettre fin à l’épidémie du VIH

Le Dr François Durand, Directeur médical VIH de Gilead France, rappelle que la prévention du VIH est primordiale pour atteindre l’objectif d’éradiquer l’épidémie à l’horizon 2030.

Pourquoi la lutte contre le VIH reste-t-elle encore aujourd’hui un enjeu majeur, même en France ?

Grâce aux progrès scientifiques majeurs des dernières décennies, l’infection par le VIH est devenue une maladie chronique qui peut être évitée et contrôlée. Une personne vivant avec le VIH qui est sous traitement ne transmet pas le virus et peut avoir une espérance de vie comparable à celle de la population générale. On observe ces dernières années un double phénomène dans l’épidémie du VIH. D’une part, à l’échelle mondiale, pour la première fois dans l’histoire du VIH, on relève moins de nouvelles infections en Afrique subsaharienne que dans le reste du monde. D’autre part, en France, nous sommes face à une épidémie qui ne recule pas. Comme le montrent les dernières données publiées par Santé publique France, en 2023, près de 5 500 personnes ont découvert leur séropositivité. Parmi elles, 55 % sont hétérosexuelles, dont 32 % de femmes, et 40 % sont des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes. Plus inquiétant, près de la moitié (43 %) des diagnostics sont réalisés à un stade avancé ou tardif de l’infection. Par ailleurs, près de 11 000 personnes vivent avec le VIH sans le savoir. Cette « épidémie cachée » constitue non seulement un risque individuel pour la santé de la personne concernée, mais aussi un risque collectif, car celle-ci, ignorant son statut sérologique, pourrait contaminer d’autres personnes.

Nous devons aujourd’hui aller encore plus loin en matière d’innovation et d’approches centrées sur les besoins de la personne.

Quels sont les moyens de prévention du VIH mis à disposition en France ?

Nous avons la chance de disposer d’un éventail important d’outils de prévention combinée accessibles à tous : le préservatif – pris en charge à 100 % sans ordonnance pour les moins de 26 ans – permet de se protéger du VIH et d’autres infections sexuellement transmissibles. Le dépistage du virus, sous forme de sérologie, de test rapide ou d’autotest, peut être réalisé dans de nombreuses structures sans ordonnance et sans avance de frais. Côté médicaments, là aussi différentes solutions existent : une personne séronégative peut prendre un traitement préventif (PrEP) permettant de réduire le risque de contracter le VIH, ou un traitement post-exposition d’urgence (TPE) après une éventuelle exposition au virus. Enfin, les personnes séropositives sous traitement ne transmettent pas le virus, ce qui permet de casser la chaîne de contamination : c’est le traitement comme moyen de prévention (TasP).

Comment expliquer que le nombre de nouvelles contaminations ne diminue pas en France ?

D’une part, on note que les bons réflexes de prévention ne s’inscrivent pas ou plus totalement dans le quotidien des Français, avec une certaine distance par rapport au sujet du VIH et notamment un relâchement dans l’utilisation du préservatif lors de nouvelles relations sexuelles. Une enquête menée par Harris Interactive pour Gilead en juin 2024 a en effet montré que parmi les Français ayant rencontré au moins un nouveau partenaire sexuel au cours des dernières années, 53 % d’entre eux ne se protégeaient pas systématiquement. Par ailleurs, plus de 30 % des personnes interrogées ne se dépistaient pas systématiquement après une relation sexuelle non protégée. Un autre constat peut être fait : l’arsenal de prévention combinée n’est pas suffisamment connu ou ne répond pas toujours aux besoins des populations les plus à risque, souvent en situation de grande vulnérabilité. De nombreux obstacles, comme la stigmatisation liée au VIH qui persiste, limitent encore l’accès à l’information, aux services de soins ou la bonne adhésion au traitement. C’est le cas pour les femmes, qui ne sont que 3 % à utiliser la PrEP, alors qu’elles représentent 32 % des nouvelles contaminations en France.

Quelle place occupe Gilead dans cette nouvelle étape de la lutte contre le VIH ?

Gilead est l’un des principaux acteurs de l’innovation dans le domaine de la lutte contre le VIH, à l’origine d’avancées en matière de traitement, de prévention et dans la recherche d’un traitement curatif. Grâce à notre recherche, nous avons pu développer et mettre à disposition 12 médicaments contre le VIH, dont le premier traitement en un comprimé unique par jour et le premier antirétroviral utilisé en prévention du VIH (PrEP). Nous devons aujourd’hui aller encore plus loin en matière d’innovation et d’approches centrées sur les besoins de la personne. En ce qui concerne la prévention, aucune méthode ne peut stopper l’épidémie de VIH à elle seule : les derniers chiffres nous montrent qu’il est essentiel de poursuivre le travail de pédagogie et d’information au plus grand nombre avec l’ensemble des parties prenantes, afin d’éviter de nouvelles contaminations. Nous sommes fiers d’apporter notre soutien institutionnel depuis plusieurs décennies à des associations de patients et des associations communautaires pour les soutenir dans leurs actions d’accompagnement et de prévention auprès des communautés particulièrement touchées par l’épidémie de VIH.

Antoine Largier


Article extrait du dossier Grand Angle spécial VIH réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 1er décembre 2024.

Photo : © Gilead / DR