Asthme et BPCO : faire des maladies respiratoires une priorité de santé publique

Directeur médical d’AstraZeneca France, et pneumologue de formation, Gabriel Thabut revient sur l’ambition de son entreprise, la force de ses innovations scientifiques, les performances technologiques et industrielles de son site de Dunkerque, mais aussi sur les progrès réalisés dans la prise en charge des maladies respiratoires en France.

Votre entreprise est engagée de longue date dans la prise en charge des maladies respiratoires. aujourd’hui, quelle est votre ambition pour les patients ?

AstraZeneca a été l’un des acteurs pionniers dans le traitement de l’asthme et de la BPCO en développant, il y a plus de cinquante ans, des bronchodilatateurs et des corticoïdes inhalés. Ces dernières années, notre portefeuille respiratoire s’est enrichi avec une technologie innovante, qui nous a permis de développer un dispositif contenant trois principes actifs et avec l’arrivée d’anticorps monoclonaux. D’abord mises à disposition auprès des patients atteints d’asthme sévère, ces thérapeutiques sont aujourd’hui en cours de développement dans le traitement des exacerbations aiguës, mais aussi dans la BPCO ou encore la polypose nasosinusienne sévère. Notre ambition aujourd’hui, avec ces biothérapies, est de parvenir à la rémission clinique, puis à la guérison des patients.

En quoi votre site de production à Dunkerque constitue-t-il un atout majeur pour atteindre votre ambition pour les patients, mais aussi pour la planète ?

Notre site de production de Dunkerque est le centre d’excellence mondial du groupe, entièrement consacré au développement et à la production de médicaments sous forme de poudre sèche et d’aérosols pour le traitement de l’asthme et de la BPCO. Ce site incarne aussi les objectifs ambitieux du groupe en termes de développement durable. Avec la mise au point de notre futur inhalateur utilisant un gaz propulseur au potentiel de réchauffement climatique proche de zéro et l’amélioration des processus industriels, le site de Dunkerque est une démonstration forte de l’ambition d’AstraZeneca de mettre à disposition des médicaments innovants, tout en ayant un impact positif sur la planète, les personnes et la société.

Quel regard portez-vous sur les récents progrès réalisés dans la prise charge des maladies respiratoires en France ?

Ces innovations thérapeutiques n’ont de réel impact que si elles parviennent au patient. Cela suppose que les patients soient identifiés et que les médecins aient accès à ces molécules. La prévention et le dépistage précoce des maladies respiratoires sont sans conteste des priorités majeures de santé publique, car plus les patients sont détectés tôt, plus l’aggravation des symptômes peut être retardée ou évitée. Nous saluons les récentes initiatives visant à renforcer la place de la santé respiratoire dans les politiques publiques. Parmi elles, l’intégration de la spirométrie dans les bilans de santé à des âges clés, portée par le Collectif Droit à respirer, est un progrès notable, tout comme la priorité donnée par l’Assurance-Maladie au dépistage de la BPCO et des maladies cardiovasculaires auprès des personnes à risque. Enfin, la Cour des comptes a appelé à intégrer la santé respiratoire dans la stratégie nationale de santé. Toutes ces mesures vont dans le bon sens pour une meilleure prise en charge des patients.

Photo : © Geol-alex bonnemaison-AstraZeneca / DR


BPCO : vers une meilleure prise en compte du risque cardiopulmonaire

La bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) est une maladie grave qui peut conduire à des évènements respiratoires sévères, mais également cardiovasculaires. On parle alors de risque de cardiopulmonaire. Rencontre avec la Pr Maéva Zysman, pneumologue au CHU de Bordeaux, et le Pr Alain Cohen Solal, cardiologue à l’hôpital Lariboisière (APHP), à Paris.

En quoi les exacerbations représentent-elles une menace pour la vie des patients atteints de BPCO ?

Pr Maéva Zysman L’exacerbation est définie par une majoration des symptômes respiratoires (toux, essoufflement, crachats). Une exacerbation sévère avec insuffisance respiratoire aiguë nécessite une hospitalisation en urgence. Plus l’exacerbation est grave et plus le risque cardiovasculaire (CV) est augmenté de manière importante. D’après une récente étude française, les évènements cardiovasculaires surviennent majoritairement dans les trente jours suivant l’exacerbationet peuvent conduire au décès du patient à l’hôpital dans 10 % des cas.

Pouvez-vous nous en dire plus sur le risque cardiovasculaire associé à la BPCO ?

Pr Alain Cohen Solal Entre 20 % et 70 % des patients atteints de BPCO présentent des facteurs de risque cardiovasculaire. Jusqu’à un tiers des décès des patients BPCO est d’ailleurs dû à une maladie coronaire. Après une exacerbation, ces patients deviennent à très haut risque cardiovasculaire. Dans la première semaine qui suit l’exacerbation, le risque de survenue d’évènements cardiovasculaires ou de décès est multiplié par huit.

Comment évaluez-vous la prise en charge du risque cardiopulmonaire ?

Pr M. Z. Avant d’aborder la question de la prise en charge, il est important de souligner que le risque cardiopulmonaire représente une avancée majeure dans la compréhension des risques associés à la BPCO, au-delà de l’exposition au tabagisme. Des experts internationaux ont défini le risque cardiopulmonaire comme le risque de survenue d’événements cardiovasculaires ou respiratoires graves ou encore de décès chez les patients atteints de BPCO.

Pr A. C. S. Pour le moment, il faut reconnaître que ce risque est sous-estimé aussi bien par les pneumologues, les cardiologues, que par les médecins généralistes. C’est tout l’enjeu d’un travail récent, réalisé conjointement par les cardiologues et les pneumologues et qui définit les éléments à évaluer afin de prendre en compte ce risque. Idéalement, dans le suivi d’un patient, le pneumologue devrait réaliser des examens complémentaires de base à visée cardiovasculaire et adresser le patient au cardiologue si nécessaire.

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Asthme sévère : viser la rémission, bientôt une réalité pour les patients

Trop de malades présentent encore un asthme non contrôlé et souffrent de symptômes quotidiens qui limitent leurs activités. Parmi eux, certains présentent un asthme dit sévère, sous-diagnostiqué et insuffisamment pris en charge, alors qu’un traitement par biothérapies pourrait les soulager. Explications du Pr Arnaud Bourdin (CHU de Montpellier).

Comment identifier les patients non contrôlés et ceux souffrant d’un asthme sévère ?

L’ asthme non contrôlé peut être identifié par l’intensité des symptômes, notamment les crises fréquentes (qui peuvent se manifester seulement par de la toux parfois productive, mais le plus souvent par une respiration sifflante et parfois difficile) et les réveils nocturnes avec, en corollaire, une consommation élevée de corticoïdes oraux et de traitement de secours (de type bronchodilatateurs d’action rapide). La zone d’alerte d’une prise excessive de corticoïdes oraux commence à 500 mg de dose cumulée annuelle (soit 25 comprimés par an, un seuil vite atteint). A 1 g de dose cumulée annuelle, on passe en zone rouge avec un risque d’effets secondaires importants plus tard dans la vie (diabète, ostéoporose, hypertension artérielle, obésité, etc.). Un autre marqueur d’un mauvais contrôle de l’asthme est le nombre de flacons de bronchodilatateurs de courte durée d’action utilisés par an, comme traitement de secours. Un patient bien contrôlé ne devrait pas en utiliser du tout : au-delà de trois par an, il existe des risques pour le patient. A ce stade-là, le patient doit consulter un pneumologue qui procède alors à des explorations supplémentaires et peut faire le diagnostic d’asthme sévère (de 3 à 5 % des asthmatiques), si l’asthme reste mal contrôlé malgré un traitement optimal (corticoïdes inhalés et bronchodilatateur de longue durée d’action).

En quoi les biothérapies constituent-elles une avancée dans la prise en charge des patients atteints d’asthme sévère ?

Une meilleure connaissance de l’inflammation des voies respiratoires chez les personnes atteintes d’asthme a permis de développer une nouvelle voie thérapeutique, en particulier les biothérapies ciblant l’inflammation de type 2 liée aux éosinophiles. Les résultats sont notables sur les symptômes, sur la diminution des exacerbations (certaines biothérapies ont montré une diminution importante du passage aux urgences), sur la réduction de recours aux corticoïdes, sur l’amélioration de la fonction respiratoire et de la qualité de vie. De 85 à 90 % des asthmatiques ont aussi des atteintes des sinus (rhinite, polypose nasosinusienne) et certaines biothérapies permettent également de les soulager.

Quelles sont les perspectives pour les patients ?

L’avènement des biothérapies qui s’administrent par voie sous-cutanée toutes les deux, quatre ou huit semaines, et peut-être à l’avenir tous les six mois, a ouvert la voie au concept de rémission* sous traitement (chez 1/3 des patients). Par ailleurs, des études sont en cours pour évaluer le bien-fondé d’une intervention plus précoce dans l’histoire de la maladie.

*Le concept de rémission sous traitement allie des symptômes nuls ou très légers, l’absence de recours aux traitements de secours (corticoïdes oraux, broncho-dilatateurs d’action rapide), une fonction respiratoire optimale, et un accord du patient et de son médecin sur cette notion de rémission.

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Aérosols-doseurs et empreinte carbone

Traiter efficacement les patients tout en préservant la planète. Le point avec le Pr Nicolas Roche, pneumologue à l’hôpital Cochin, à Paris.

Quelles sont les répercussions environnementales des inhalateurs utilisés dans les pathologies respiratoires ?

Les inhalateurs représentent la pierre angulaire de la prise en charge médicamenteuse des patients atteints d’asthme ou de BPCO. Il faut distinguer les aérosols-doseurs pressurisés qui contiennent des gaz à effets de serre des inhalateurs de poudre sèche qui présentent une plus faible empreinte carbone. Les gaz chlorofluoro-carbures (CFC) qui étaient très nocifs pour la couche d’ozone ont été interdits en 1987 par le protocole de Montréal et remplacés par le HFA (hydrofluoroalcane), dont l’impact sur l’environnement est moindre mais non nul.

Comment faire, dès lors, pour réduire l’empreinte carbone ?

Il y a plusieurs façons de répondre à la préoccupation de l’empreinte carbone liée aux aérosols-doseurs pressurisés. La première est d’inciter les praticiens à privilégier les inhalateurs de poudre sèche. Une obligation de passage systématique de l’aérosol-doseur pressurisé à l’inhalateur de poudre sèche n’est toutefois pas souhaitable. En effet, chaque dispositif d’inhalation présente des modalités d’utilisation spécifiques et la priorité est de donner au patient un dispositif bien sûr efficace et bien toléré, mais aussi qui lui convienne et qu’il utilise correctement. L’éducation à la bonne utilisation des dispositifs (quels qu’ils soient) est donc un autre moyen de réduire l’empreinte carbone en améliorant le contrôle et le besoin de traitements de secours. De même, le choix du dispositif le plus adapté à chaque patient, en améliorant l’efficacité du traitement, permet d’éviter des hospitalisations, une surconsommation de soins et, in fine, de réduire l’empreinte carbone. Une hospitalisation, par exemple, est très coûteuse sur ce plan. Une autre piste consiste à travailler à l’échelle industrielle pour utiliser des gaz propulseurs dont l’impact environnemental est moindre.

Où en sont les recherches sur les nouveaux gaz ?

Plusieurs industriels développent des dispositifs de nouvelle génération, essentiellement avec deux gaz ayant un impact environnemental très inférieur à celui de leurs prédécesseurs. C’est une voie intéressante, car elle permettrait de respecter l’individualisation du choix du dispositif telle qu’on la pratique actuellement, tout en préservant l’environnement.

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Christine Fallet


Information communiquée par l’entreprise de santé AstraZeneca FR-21113 – 01/2025

Articles extraits du dossier Grand Angle spécial Maladies repiratoires réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 25 janvier 2025.