Cancer : associer pour progresser

« Il y a schématiquement deux façons de considérer les cancers et leur traitement.

La première s’attaque directement aux cellules malades. La chirurgie, la radiothérapie, la chimiothérapie, et plus récemment les thérapeutiques « ciblées » développées dans le contexte d’une médecine « personnalisée » entrent dans cette catégorie. Cette approche s’appuie sur la vision « réductionniste »: le cancer est une maladie de la cellule qui, du fait de modifications accumulées dans ses gènes, prend l’avantage sur les cellules normales et quitte son tissu d’origine pour former des métastases. Les traitements ciblant directement la cellule tumorale sont efficaces. Ils permettent de guérir plus de 50% des patients. Ce chiffre atteste aussi de leurs limites.

La seconde, plus holistique, est indirecte. Il existe, dans les tissus de sujets sains, des cellules porteuses d’altérations génétiques qui entraîneront jamais de cancer. Pour qu’une tumeur se développe, l’environnement des cellules transformées doit être permissif. Le cancer est donc une maladie de l’organisme dont l’homéostasie est rompue. Le traitement doit réduire ou inverser ces perturbations de l’environnement des cellules malades. C’est ce que font les immunothérapies qui rétablissent la capacité des cellules immunitaires défaillantes à éliminer les cellules malades, une approche qui s’avère très efficace dans de nombreux cancers.

Dans le traitement des cancers les plus graves, l’enjeu est aujourd’hui d’associer ces deux approches qui se complètent. Les 3 plans cancers ont renforcé l’interdisciplinarité, propice au développement de ces associations qui génèrent à juste titre beaucoup d’espoir. La mortalité par cancer a commencé à diminuer. Le développement pragmatique de la génomique clinique, placé sous le contrôle de l’Institut National du Cancer et de l’INSERM, et l’accès facilité des patients à l’innovation thérapeutique, notamment académique, qui dépend de la Direction Générale de la Santé, sont des conditions essentielles à la poursuite de cette amélioration. »

Pr Eric Solary. Professeur à l’Université Paris-Sud. Directeur de la Recherche de Gustave Roussy.