Médecine personnalisée : quels enjeux pour les patients ?

La médecine personnalisée est une révolution pour les patients en oncologie. Elle permet d’envisager des traitements ciblés, promesse d’efficacité et de tolérance.

Des défis demeurent : informer le patient de l’importance de la caractérisation de la maladie, accéder aux tests recommandés et permettre leur remboursement afin d’accéder aux thérapies ciblées ou aux immunothérapies correspondantes. La voix des patients doit être entendue pour une médecine efficiente, équitable et améliorant la qualité de vie. Connaître précisément les caractéristiques de la maladie est essentiel au moment de la découverte initiale, d’une récidive ou d’une rechute, comme en cas d’échappement au traitement. Caractériser la tumeur ou la métastase à travers une biopsie tissulaire ou une biopsie liquide donne la possibilité, en fonction des biomarqueurs identifiés, de changer radicalement la proposition de traitements : par exemple, la mutation BRCA et le test HRD permettent aux patientes touchées par un cancer de l’ovaire de vivre plus longtemps ou de réduire leur risque de rechute avec les inhibiteurs de PARP ; 40 % des cancers du poumon sont susceptibles de bénéficier de thérapies ciblées si on fait la recherche des mutations EGFR, ALK, ROS1, RET, NTRK, KRAS, BRAF, MET… Par ailleurs, des signatures génomiques rendent possible une désescalade des traitements en évitant des chimiothérapies inutiles dans les cancers du sein hormonodépendants.

La réalité reste complexe. Les tests moléculaires pris en charge par l’Assurance-Maladie sont trop peu nombreux en routine. Les techniques sont variables (immuno-histochimie, hybridation, séquençage) ; il existe des tests«  ciblés  » (par exemple, l’EGFR) ou des séquençages haut débit (NGS) qui permettent d’avoir les résultats sur des panels de gènes. Depuis 2018, le RIHN (le référentiel des actes innovants hors nomenclature) a permis de financer des innovations en biologie et génétique, mais cette enveloppe fermée s’est enrichie de nombreux tests sans qu’on les voie « sortir » dans le droit commun. Les conséquences sont un déficit de propositions de tests dans les centres de soins qui n’ont pas la capacité de prendre en charge leur surcoût : ils ne sont remboursés qu’à 50 % ! Cela engendre une iniquité d’accès aux tests et donc aux traitements ciblés pour de nombreux patients avec des pertes de chance bien réelles ! Une dynamique d’évaluation et d’accès cohérente des tests et des médicaments est nécessaire pour que les patients y accèdent équitablement, mais aussi pour faire la preuve de l’efficience de ces innovations sur le long terme.

Laure Guéroult Accolas, Directrice, Fondatrice de Patients en réseau

Mon réseau cancer® du sein, Mon réseau cancer® gynéco, Mon réseau cancer® du poumon, Mon réseau cancer® colorectal.


Article extrait du dossier Grand Angle spécial Cancer réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 3 juin 2023.

Photo © BMS Patients en réseau / DR