La drépanocytose sort de l’ombre grâce à l’innovation

Si la drépanocytose requiert plus que jamais l’attention des pouvoirs publics, la France est l’un des pays les plus avancés dans sa prise en charge. Échange avec le Pr Frédéric Galactéros, généticien au CHU Henri-Mondor, à Créteil.

Que représente la drépanocytose en France ?

450 à 500 nouveau-nés sont diagnostiqués en France chaque année et 25 000 à 35 000 patients y sont recensés. 50 à 55 % des malades auraient moins de 18 ans et 45 à 55 % ont 37 ans, en moyenne. Ces chiffres mettent en avant un fort dynamisme des naissances face à des moyens de prise en charge qui progressent moins vite. D’autre part, la répartition des drépanocytaires est très inégale sur le territoire, 50 % sont en effet concentrés en Île-de-France. Ce qui pose des problèmes d’ajustements des moyens de la prise en charge.

Quelles sont les actions des pouvoirs publics ?

Si les associations sont actives, elles ont peu les moyens de faire entendre leur voix auprès des décideurs qui, au niveau national, ne mènent pas de politique spécifique. Les DOM ont développé une politique régionale claire via les ARS locales. De son côté, la région Île-de-France considère la drépanocytose comme une priorité de santé publique, soutient la recherche et l’innovation prometteuse et a participé à des campagnes de sensibilisation.

Quels sont les leviers pour améliorer la prise en charge ?

Le dépistage néo-natal systématique est une priorité. En France, l’espérance de vie des drépanocytaires est l’une des plus élevées au monde  ; elle approche les 60 ans. Cette amélioration est liée au dépistage, aujourd’hui ciblé, qui conditionne l’accès à la prise en charge (vaccination, éducation parentale et thérapeutique des enfants, information des personnels scolaires, greffe, traitement par hydroxyurée, etc.) En zone médicalisée, les enfants non dépistés à la naissance ont 15  % de risques de mourir dans les deux premières années. Ce chiffre est de 90 % dans les zones non médicalisées.

Quel est le rôle de l’innovation thérapeutique ?

En s’intéressant à la maladie, l’industrie pharmaceutique nous a permis de quitter le statut d’« orphelinat ». Différents axes thérapeutiques sont explorés : prévention des crises, atténuation de la sévérité et de la durée des crises, gestion de l’anémie. Toutes ces approches pourront effectivement être disponibles, comme la thérapie génique. Cette dernière sera évaluée dans un essai, dès janvier, et serait accessible pour tous dans trois ou quatre ans. Autant d’innovations qui posent des questions économiques, mais aussi éthiques, concernant leur mise à disposition pour les pays du Sud.

Gézabelle Hauray

Crédit photo : Hamid Azmoun

Article extrait du dossier Grand Angle réalisé par CommEdition, paru dans Le Monde