L’ostéoporose devrait être une priorité nationale

Problématique de santé publique, l’ostéoporose touche plus de 4 millions de françaises et de français.  L’association française de lutte antirhumatismale (Aflar) y a sensibilisé les autorités. Le point avec le Dr Laurent Grange, rhumatologue au CHU de Grenoble Alpes et président de l’association.

Où en est la prise en charge de l’ostéoporose en France ?

L’ostéoporose est une véritable patho­logie, aux impacts considérables. Les traitements efficaces existent, mais sont trop peu et même de moins en moins prescrits. 85 % des patients ne sont pas traités après hospitalisation pour une fracture ostéoporotique. Alors qu’une fracture provoquée par une chute de sa hauteur devrait auto­matiquement faire l’objet d’un bilan. Le nombre d’ostéodensitométries baisse de 6 % par an et le nombre de patients traités diminue. A cela deux raisons, les patients ont pu être ex­posés à des informations brouillant les messages des médecins, qui eux-mêmes sont parfois démunis face à cette pathologie par manque de temps ou par peur d’effets indésirables des traitements. Ces derniers sont pourtant rares et bien inférieurs aux bénéfices (réduction de 60 à 70 % du risque de fractures).

Pour favoriser la formation des médecins généralistes sur cette pathologie, dont ils sont chargés à plus de 80 %, nous avons travaillé avec le Syndicat des ensei­gnants de médecine générale, mais aussi avec la Cnam.

Quelles sont les conséquences de ce manque de prise en charge ?

Ces fractures en appellent d’autres, diminuent la qualité de vie et l’auto­nomie et augmentent le risque de mortalité. Aujourd’hui, de 4 à 5 mil­lions de Français souffrent d’ostéo­porose, entraînant 380 000 fractures par fragilité osseuse en 2017. En 2030, ce chiffre aura augmenté de 26 %, ce qui générera une hausse des coûts de prise en charge de 5,4 à 6,8 mil­liards. Des conséquences directes de la baisse de prise en charge, comme le note le rapport de l’International Osteoporosis Foundation (IOF).

Quel a été le travail de l’Aflar pour faire évoluer la situation ?

L’Aflar a créé l’Alliance nationale de l’ostéoporose et a mis en place les états généraux de l’ostéoporose en 2017. Sept propositions d’amélio­ration du parcours de soins en sont issues. Par exemple, pour favoriser la formation des médecins généralistes sur cette pathologie, dont ils sont chargés à plus de 80 %, nous avons travaillé avec le Syndicat des ensei­gnants de médecine générale, mais aussi avec la Cnam. D’un point de vue institutionnel, nous avons sen­sibilisé les décideurs : l’Assemblée nationale, le Sénat et le ministère.

Quelle est la position des autorités face à cette pathologie ?

Dans le plan Ma santé 2022, présenté il y a quelques semaines par le Pré­sident de la République, Emmanuel Macron, l’ostéoporose a été reconnue comme une priorité nationale au même titre que l’insuffisance car­diaque. La création d’un parcours de soins spécifiques en sera le premier engagement concret.

Gezabelle Hauray

Article extrait du dossier Grand Angle – Spécial rhumatologie, réalisé par CommEdition, paru dans Le Monde daté du 11 décembre 2018.