La fibrillation atriale (FA) est à l’origine de 25 % des AVC liés à une occlusion d’artère chaque année. La repérer tôt et bien la traiter est donc essentiel pour réduire le risque d’infarctus cérébral.
Si les efforts de prise en charge ont été spectaculaires en quinze ans, l’Accident vascu-laire cérébral (AVC) reste un fléau sanitaire. « L’AVC touche 150 000 personnes par an et provoque 30 000 décès, souligne le Pr Emmanuel Touzé, neurologue vasculaire (CHU de Caen) et président de la Société française neuro-vasculaire (SFNV). En dépit des progrès obtenus, grâce à une meilleure prévention des facteurs de risque et une amélioration des traitements, sa fréquence continue d’augmenter en raison du vieillissement de la population. Au cours de sa vie, une personne sur six sera confrontée à l’AVC. »
Les spécialistes distinguent deux types d’AVC : les infarctus cérébraux (80 % des cas) et les hémorragies cérébrales ou méningées (20 %). « Les infarctus, appelés également AVC ischémiques, résultent de l’occlusion d’une artère cérébrale par un caillot sanguin, précise le Pr Touzé. Les hémorragies sont provoquées par la rupture d’une artère cérébrale, au niveau du cerveau ou des méninges. » Outre la limitation de certains facteurs de risque (obésité, diabète, tabagisme, hypertension, cholestérol), la prévention passe également par la détection de pathologies associées à une majoration importante du risque d’AVC, telles que la fibrillation atriale.
Des traitements préventifs efficaces
Parmi les pathologies associées, la fibrillation atriale (FA, dite aussi auriculaire), qui se traduit par une arythmie cardiaque, est diagnostiquée chez 25 % des patients atteints d’AVC. Dans 50 % des cas, la FA est même découverte à l’occasion d’un AVC. La FA favorise la formation d’un caillot dans l’oreillette, ce caillot partant dans la circulation cérébrale. « Une bonne prise en charge de la fibrillation atriale et de ses complications est un défi majeur pour lutter contre l’AVC. Elle repose depuis peu sur de nouveaux anticoagulants, témoigne le Pr Atul Pathak, cardiologue et de mieux organiser le dépistage. Il faut donc sensibiliser la population et les professionnels au repérage des symptômes. »
Par rapport aux produits anciens, les études montrent que ces nouveaux anticoagulants sont aussi efficaces,mais présentent moins de risque d’hémorragies. De plus en plus souvent prescrits en première intention, leur bénéfice/risque est très favorable, avec une réduction de 20 % à 30 % du risque d’AVC chez les patients traités.
Mieux informer et structurer la filière
Aujourd’hui, les spécialistes se mobilisent pour mieux organiser la filière de dépistage et de prise en charge de la fibrillation atriale. « Les signes avant-coureurs - palpitations, essoufflements, malaises - doivent être mieux connus du public, et les professionnels doivent également être en alerte, notamment en cas d’hypertension artérielle, détaille le Pr Pathak. Il faut miser par ailleurs sur l’essor de nouvelles technologies, comme les électrocardiogrammes (ECG) en ambulatoire et les montres connectées pour améliorer la précocité du diagnostic. » Le Pr Touzé rappelle pour sa part les progrès réalisés dans le traitement des infarctus cérébraux. « En cas d’occlusion artérielle, la technique de la fibrinolyse, qui consiste à détruire les caillots sanguins par voie intraveineuse, est requise. Mais, en moyenne, on ne parvient à éliminer que 50 % des caillots par ce traitement. Les caillots sanguins issus des cavités cardiaques sont plus gros et responsables d’accidents plus graves et plus difficiles à traiter. »
Depuis quelques années, une nouvelle technique, appelée thrombectomie, peut y être associée. Elle consiste à retirer mécaniquement le caillot qui obstrue l’artère cérébrale à l’aide d’un stent retriever, une sorte de ressort. « Elle diminue de 20 % en moyenne les risques de décès et de handicap, précise le Pr Touzé, mais elle doit être idéalement pratiquée dans les six heures qui suivent l’événement, par des équipes habituées à utiliser cette technique. » Pour la fibrillation atriale comme pour l’AVC, l’enjeu reste d’optimiser l’ensemble des interventions, de la prévention à la gestion post-traitement, avec un impératif essentiel : gagner la course contre la montre. Plus la prise en charge est précoce, et plus les chances de survie sans handicap sont élevées.
Stéphane Corenc
Article extrait du dossier Grand Angle réalisé par CommEdition, paru dans Le Monde
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