Les ménisques sont des fibrocartilages qui servent d’amortisseurs entre le fémur et le tibia. Au nombre de deux, le ménisque interne et le ménisque externe, ils sont essentiels à la mobilisation des genoux et participent selon les mouvements à leur stabilisation.
Dr Johannes Barth, président de la Société francophone d’arthroscopie.
Les pathologies méniscales sont extrêmement fréquentes et touchent aussi bien les jeunes sportifs que les personnes plus âgées et sédentaires. Une lésion aiguë du ménisque va engendrer des douleurs et des blocages du genou, entraînant une gêne dans les activités professionnelles, sportives ou de loisirs mais aussi au quotidien. A long terme, les lésions des ménisques vont aboutir à une usure prématurée des cartilages hyalins, provoquant des crises douloureuses et évoluant vers une arthrose du genou. La prise en charge des patients souffrant d’une pathologie méniscale aiguë ou chronique est source de nombreux arrêts de travail, de soins médicaux et d’interventions chirurgicales, représentant plus de 200 000 interventions par an. Cela en fait la chirurgie ostéo-articulaire la plus pratiquée en France, avec un impact socio-économique non négligeable, bien qu’elle soit réalisée sous arthroscopie (c’est-à-dire avec une petite caméra sans ouvrir l’articulation) dans les unités de soins ambulatoires (le patient rentre à domicile le jour même de l’intervention). Les lésions des ménisques ne nécessitent pas toutes une intervention chirurgicale. La plupart des lésions dites « dégénératives », d’usure, sont traitées médicalement sans recours à la chirurgie. Mais lorsque l’indication d’opérer est retenue, deux types de gestes chirurgicaux sous arthroscopie peuvent être proposés :
La suture – (ou réparation) du ménisque
Elle est recommandée lorsque les déchirures méniscales sont récentes, situées dans des zones périphériques bien vascularisées qui cicatrisent facilement, chez des personnes jeunes. Les ménisques sont recousus par le chirurgien, qui utilise du matériel orthopédique tel que des fils spécifiques ou des implants de fixation résorbables comme des ancres, qui peuvent être onéreux. C’est un geste chirurgical long, techniquement exigeant, et qui requiert un long apprentissage pour être parfaitement maîtrisé. Il permet de préserver le capital du ménisque et donc de limiter l’apparition future d’une arthrose du genou (celle-ci est potentiellement coûteuse à traiter par la suite : infiltrations, médicaments, rééducation, arrêts de travail, chirurgie plus lourde de type ostéotomie ou prothèses partielles ou totales du genou). Cet acte technique n’est pas très bien valorisé économiquement par le système de cotation de la nomenclature des actes médicaux (CCAM), eu égard au temps consacré à sa réalisation, et à l’expertise requise. Il est même non rémunéré s’il est fait dans le même temps qu’une réparation du ligament croisé antérieur du genou. L’autre difficulté que peut rencontrer le chirurgien souhaitant réaliser une suture méniscale est le plafonnement de la prise en charge du matériel nécessaire à la suture du ménisque par la CPAM, avec une limitation à trois ancres remboursées par intervention.
Au-delà, le chirurgien et l’établissement de soins doivent discuter avec le fournisseur de matériel médical des modalités financières pour bénéficier d’ancres supplémentaires.
La résection d’une partie du ménisque
Elle consiste à enlever uniquement la zone abîmée du ménisque. C’est la méniscectomie partielle. Le chirurgien laisse en place le plus de ménisque possible. Il conserve au mieux toutes les parties saines du ménisque. C’est un acte chirurgical moins lourd techniquement que la suture méniscale. Il donne de très bons résultats précoces, mais ces résultats se dégradent progressivement, avec l’apparition quasi systématique d’une arthrose du genou à long terme.
La valorisation économique de la méniscectomie par la nomenclature CCAM est très proche de la valorisation de la suture méniscale. Il n’y a pas d’incitation financière à pratiquer un des deux actes. Le praticien propose toujours le geste chirurgical le plus adapté au patient, en plaçant l’intérêt de celui-ci avant l’enjeu économique. Ces deux techniques sont complémentaires et permettent au thérapeute de traiter la plupart des lésions méniscales rencontrées.
Les suites opératoires après une méniscectomie ou une suture méniscale sont très différentes, avec des conséquences non négligeables sur le plan médical et social.
Après une méniscectomie, la réadaptation du patient est souvent simple. Il est recommandé de marcher dès que possible. La rééducation par kinésithérapie se révèle parfois nécessaire. Elle permet de récupérer rapidement et débute immédiatement après l’intervention. Ses objectifs sont de retrouver une mobilité normale du genou et de restaurer la force musculaire et le fonctionnement global du genou.
La rééducation peut être effectuée :
- Chez un kinésithérapeute, sur prescription du médecin traitant ou du chirurgien.
- En auto-rééducation. Le patient suit les consignes et effectue les exercices expliqués par le chirurgien. C’est le cas le plus fréquent après une arthroscopie. L’arrêt de travail ou des activités sportives est de courte durée, donc avec un impact socio-économique modéré.
- Après une réparation d’un ménisque, les suites opératoires sont plus longues.
- Une immobilisation par attelle est souvent prescrite pour favoriser la cicatrisation.
- Des précautions d’appui sont recommandées jusqu’à six semaines pour protéger la zone de suture méniscale, avec parfois la prise d’anticoagulants qui nécessitent une prescription de soins infirmiers quotidiens et une surveillance biologique étroite. Les complications liées à la prise d’anticoagulants ne sont pas rares.
- L’arrêt de travail ou des activités sportives est plus conséquent, avec un impact socio-économique immédiat plus important pour le patient et la société. Toutefois, à long terme, l’impact économique et médical de la suture est plus favorable que la méniscectomie, grâce à un taux d’évolution vers l’arthrose moindre.
Une meilleure compréhension du rôle des ménisques et donc de la nécessité de les préserver au mieux a abouti au concept de la préservation méniscale. Celui-ci est apparu au début des années 2000. Encore aujourd’hui, toutes les lésions méniscales ne peuvent pas être réparées. En revanche, toute lésion réparable doit l’être afin de préserver l’avenir du genou.
La Société francophone d’Arthroscopie (SFA) est une association 1901 à but non lucratif ayant pour finalité la promotion et le développement des techniques arthroscopiques dans le traitement des affections de l’appareil locomoteur, regroupées au sein d’une spécialité médico-chirurgicale, l’orthopédie.
Sans distinction de pratique professionnelle, elle rassemble des chirurgiens orthopédistes du secteur public et libéral et compte plus de 2 000 membres.
La SFA a une mission d’enseignement, c’est pourquoi elle organise chaque année des master courses, où elle sollicite ses meilleurs experts, qui vont partager leurs savoirs de manière bénévole avec les chirurgiens en formation.
La SFA présente ici sa réflexion autour des affections des ménisques afin de sensibiliser le grand public au concept de préservation du ménisque.
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Ménisques réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 17 décembre 2021.
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