Cardiologie : préparer le futur

Pr Christophe Leclercq, président de la Société Française de Cardiologie

En plus de vingt ans, l’accélération des progrès technologiques, thérapeutiques et organisationnels a changé le monde de la cardiologie. Des victoires décisives ont pu être emportées sur l’infarctus du myocarde, l’AVC, les troubles du rythme, l’insuffisance cardiaque ou les pathologies des valves cardiaques. Mais ces avancées sont aujourd’hui à l’origine d’un paradoxe : les maladies cardio-vasculaires se sont « banalisées », et le grand public tend à croire qu’elles sont à pronostic « bénin », grâce à l’efficacité des traitements proposées. Or, il faut le rappeler : la mortalité cardio-vasculaire reste en deuxième position des causes de décès en France et la première chez la femme. Avec le vieillissement de la population, elles sont appelées à croître de façon exponentielle. Les défis d’avenir sont donc, en premier lieu, éducationnels. Il faut progresser dans la prévention primaire, la prévention secondaire et la lutte contre les facteurs de risque (tabagisme, sédentarité, surpoids, diabète, hypertension…), pour lesquelles il faut réinventer les messages pour les adapter à la pluralité des publics. Le diagnostic doit également devenir plus précoce et plus systématique, avec des incitations à la mobilisation des professionnels de santé de premier recours, et il faut former rapidement plus de cardiologues afin de mieux protéger le cœur des Français. Enfin, nous devons progresser dans la lutte contre les épidémies « cachées », ces maladies méconnues des Français, comme l’insuffisance cardiaque, dont la mortalité est plus élevée que bien des cancers. Grâce aux découvertes scientifiques de ces dernières années, de nouveaux gains d’espérance de vie peuvent être obtenus. Le rétrécissement aortique traité par cathéter, sans chirurgie, en est un exemple. Les avancées de l’imagerie, permettant de mieux analyser les plaques d’athérome et d’identifier celles à risque de provoquer un infarctus, en est un autre. Pour autant, nous devons nous mobiliser pour que ces techniques soient accessibles aux patients qui en ont besoin, dans des conditions de qualité et de sécurité optimales, par exemple la télémédecine.

C’est pourquoi il faut investir davantage dans l’innovation en cardiologie, mais également dans la diffusion au plus grand nombre des innovations thérapeutiques.


Article extrait du dossier Grand Angle spécial Cardiologie réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 30 septembre 2023.

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