« IL FAUT, D’URGENCE, UN PLAN DOULEUR »

Pr Frédéric Aubrun, Président de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD)

Société savante consacrée à lalutte contre la douleur, la SFETD le répète depuis des années : la prise en charge de la douleur constitue un défi majeur pour la santé publique. Un Français sur cinq en souffre de façon chronique. Mais le sujet n’est pas apprécié à sa juste mesure par les pouvoirs publics. Depuis 2010, nous militons en effet, mais sans succès, pour un plan de santé publique spécifique.

En 1998, sous l’impulsion de Bernard Kouchner, la France innovait pourtant, en lançant le premier Plan Douleur et en structurant les filières de prise en charge. Notre modèle a inspiré de nombreux autres pays à travers le monde. Depuis, nous avons pris du retard. Les moyens se réduisent et les effectifs diminuent dans les structures spécialisées, faute d’attractivité des postes proposés. Les délais s’allongent pour les patients, de plus en plus victimes d’errance thérapeutique et dont la douleur reste souvent incomprise ou parfois négligée par les médecins qu’ils rencontrent dans leur parcours de soins.

La crise sanitaire vient renforcer l’urgence d’agir. Les personnels ont été très fortement engagés en première et deuxième lignes contre la pandémie. Une priorité légitime, mais qui a laissé de côté la prise en charge des patients atteints de douleur chronique. A la fin de l’été, la plupart des effectifs des structures spécialisées n’étaient pas reconstitués. Et les délais de prise en charge s’allongent. Une situation qui n’est pas près de s’améliorer avec l’arrivée de la seconde vague. Par ailleurs, les témoignages se multiplient, indiquant que le virus SARS-CoV2 accroît le risque de douleurs aiguës (céphalées, myalgies), mais également de douleurs chroniques et notamment neuropathiques.

Face à ce tableau clinique inquiétant, nous appelons à la mobilisation. Les autorités sanitaires doivent d’urgence élaborer un quatrième Plan Douleur. Et nous proposons également que la douleur soit déclarée Grande Cause nationale. Car il n’est plus possible de laisser 12 millions de Français sans solutions.

credit : © S FETD / DR

Article extrait du dossier Grand Angle réalisé par CommEdition, paru dans Le Monde