L’immunothérapie, une révolution thérapeutique

Pr Catherine Thiéblemont, Cheffe du service d’hémato-oncologie à l’hôpital Saint-Louis, Assistance publique-Hôpitaux de Paris-Université Paris Cité (Paris).

Avec 18 000 nouveaux cas par an, le lymphome est actuellement le cancer du sang le plus courant, survenant à un âge moyen de 70 ans. Appelés aussi « cancers des ganglions », ces cancers se caractérisent par la prolifération anormale des lymphocytes B ou T au sein du système lymphatique, et perturbent le bon fonctionnement d’organes vitaux. On distingue deux grandes familles de lymphomes : les lymphomes hodgkiniens et les lymphomes non hodgkiniens. Les lymphomes non hodgkiniens sont plus fréquents, avec de nombreuses formes spécifiques, ce qui exige d’établir un diagnostic précis et complexe à partir d’analyses anatomo-pathologiques, afin d’identifier le sous-type du lymphome et décider ensuite de la stratégie thérapeutique adaptée. Le lymphome de type B (environ 80 à 85 % des cas) est plus fréquent que le lymphome de type T (15 à 20  % des cas). Aujourd’hui, les équipes médicales disposent de solutions thérapeutiques très innovantes. Les CAR-T cells et les médicaments d’immunothérapie représentent une alternative majeure aux chimiothérapies et tendent à devenir les traitements de référence, y compris pour les phases débutantes de la maladie. Bien tolérés par les patients, ils améliorent fortement la qualité de vie des patients, mais également leur espérance de vie. Ces traitements sont également moins lourds à administrer, avec, pour les CAR-T cells, phase de collecte, une injection suivie d’une dizaine de jours de surveillance, et pour les traitements par anticorps bispécifiques, administrés par voie sous-cutanée ou intraveineuse. Notre préoccupation, aujourd’hui, est de favoriser un accès élargi des patients éligibles à ces innovations thérapeutiques. Avec 38 centres de référence pour les CAR-T cells et de nombreux centres validés pour les anticorps bispécifiques, la France dispose d’un maillage territorial des plus performants dans le monde. Ce maillage s’est construit grâce à une organisation en réseau professionnel autour de groupes coopérateurs et de recherche tels que le LYSA et l’institut CALYM, associés aux autorités sanitaires qui ont investi massivement pour renforcer les filières de prise en charge. Ces traitements restent très coûteux, mais il faut prendre en compte, dans l’évaluation de leur rapport coût/efficacité, une suppression des dépenses liées aux traitements classiques par chimiothérapie. L’innovation thérapeutique va très vite, et il faut mobiliser de nouveaux moyens pour réorganiser nos services pour faire face aux nouveaux parcours de soins des patients, et investir enfin dans le recueil et l’analyse des données. C’est à ces conditions que nous remporterons, demain, la bataille contre le lymphome.

Propos recueillis Stéphane Corenc


Article extrait du dossier Grand Angle spécial Hématologie réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 10 décembre 2023.

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