A défaut de créer un environnement favorable à l’innovation, la France pourrait rester au second plan des progrès thérapeutiques et technologiques qui caractérisent le secteur.
Lentement, péniblement, le monde sort de la crise sanitaire. La Covid-19 se chronicise, même si la menace de nouvelles flambées épidémiques reste élevée. Les Français sortent « groggy » de ces trois années de vie au ralenti… mais doivent à présent affronter les effets de la guerre en Ukraine, le retour de l’inflation, les tensions sur l’énergie. Sur le plan de la santé, de nouvelles priorités s’affichent. Comment prendre le bon virage et réinventer le logiciel, sans perdre de vue l’équité d’accès aux soins, l’universalité et la solidarité entre tous ? Plus que jamais, l’une des réponses consiste à soutenir le développement de l’innovation en santé.
Des avancées thérapeutiques majeures se profilent, avec la montée en puissance de la thérapie cellulaire, l’avènement de la thérapie génique et, au-delà, les nouvelles frontières dessinées par la biologie synthétique, les jumeaux numériques ou encore l’IA en santé. Outre les médicaments, les technologies numériques ouvrent un champ illimité pour l’exploitation des bases de données, au service de la recherche clinique, du diagnostic, de la prévention et de l’anticipation des risques sanitaires.
La France est-elle préparée à intégrer ces innovations aux pratiques médicales et aux usages par les patients ? La prise de conscience est là, comme en témoignent le Plan innovation santé 2030, la création de l’Agence de l’innovation en santé et la multiplication des appels à projet pour financer des programmes, comme la création de clusters dévolus à l’innovation.
Les enjeux sont posés : il faut d’abord simplifier les réglementations pour accélérer les délais d’accès au marché. Il faut également travailler sur les conditions de la souveraineté sanitaire, quand la crise économique illustre la vulnérabilité d’un système exposé aux pénuries de médicaments essentiels. Il faut enfin – et surtout – revoir les modalités d’évaluation et de financement de l’innovation. A défaut, le risque est grand qu’une part croissante des innovations ne se détourne du marché français. Ou pis, que les start-up hexagonales sortent du pays pour trouver meilleure fortune ailleurs.
Antoine Largier
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Innovation en santé réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 22 avril 2023.
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