L’épidémie met l’accent sur les failles de l’écosystème de santé français en matière d’innovation et d’indépendance sanitaire. Mais les initiatives se multiplient pour que le pays redevienne un leader européen.
Ségur de la Santé, France Relance, accord-cadre sur le médicament… Depuis près d’un an, les pouvoirs publics multiplient les annonces, avec des moyens considérables à la clé, pour relancer la compétitivité de l’écosystème de la santé en France. Un réveil brutal, aiguisé par l’impact de la Covid 19, lorsqu’il fallut en urgence prioriser la lutte contre le virus. Au printemps 2020, la pénurie durable de masques et d’équipements de protection avait mis en évidence la dépendance de la France en termes de produits de santé de première nécessité. A deux doigts de la catastrophe, les professionnels de santé et les entreprises du secteur ont su faire preuve de résilience. Mais la leçon est claire : il n’y aura pas de seconde chance en cas de nouvelle crise sanitaire.
Essentiellement orienté sur l’hôpital, le Ségur de la Santé prévoit 19 milliards d’euros d’investissements, destinés à revaloriser les salaires, à amortir une partie de la dette des établissements et à rénover les infrastructures (immobilier, systèmes d’information, management…). En plus de cet effort conséquent pour le personnel hospitalier, le plan France Relance, en septembre dernier, annonçait 6 milliards d’euros d’investissements pour les industries de santé (sur un total de 100 milliards d’euros). En avril dernier, plusieurs chantiers étaient détaillés. En premier lieu, 32 projets de relocalisation d’activités ont été sélectionnés, pour un montant de 93 millions d’euros d’aide publique. Les entreprises choisies ont vocation à relancer la production hexagonale de produits courants (vitamine B12, paracétamol, consommables, dispositifs d’injection…), mais également à consolider la place de la France sur les aires thérapeutiques du futur (microbiome, thérapie génique, anticorps monoclonaux…). Par ailleurs, des appels à projet ont été signés pour soutenir des entreprises engagées spécifiquement dans la lutte contre l’épidémie, pour fabriquer des vaccins ou des médicaments visant à réduire les formes graves du virus. 460 millions d’euros d’investissements y seront consacrées.
Outre la souveraineté sanitaire, l’effort public se concentre également sur une question clé : l’attractivité du pays en matière d’innovation. Comment convaincre en effet les laboratoires pharmaceutiques d’investir durablement sur le territoire ? En réduisant les délais d’accès au marché, en garantissant des niveaux de prix durables et en « bonifiant » les produits de santé fabriqués en France et/ou en Europe. Ces mesures sont au cœur de l’accord-cadre signé en mars dernier entre le Comité économiquedes produits de santé (l’instance administrative qui fixe les prix pour le compte des pouvoirs publics) et le LEEM (le syndicat professionnel). Enfin, en juillet prochain, se tiendra le nouveau Conseil stratégique des industries de santé (CSIS), censé établir de nouvelles règles durables en termes de soutien aux innovations.
Pierre Mongis
Article extrait du dossier Grand Angle Innovation Santé réalisé par CommEdition, paru dans Le Monde daté du 24 avril 2021