Maladie rénale chronique, viser le diagnostic précoce pour mieux traiter !

Néphrologue au CHU de Grenoble, le Pr Philippe Zaoui explique l’importance du dépistage de la maladie rénale chronique.

Maladie métabolique silencieuse, la maladie rénale chronique reste difficile à dépister à temps. « L’acte de dépistage, fondé principalement sur des tests d’urine et la mesure de la créatinine dans le sang, n’est pas complexe en soi, souligne le Pr Philippe Zaoui, néphrologue au CHU de Grenoble. Mais, à défaut de symptômes spécifiques, la pose du diagnostic se fait le plus souvent trop tardivement, lorsque la maladie est déjà installée. » Or, certaines comorbidités doivent être un signe d’alerte, car elles représentent des facteurs de risque d’atteinte rénale. « C’est le cas pour le diabète, bien sûr, mais également pour l’hypertension artérielle, l’insuffisance cardiaque et l’obésité, indique le Pr Zaoui. Il est donc très important que les personnes atteintes par ces pathologies fassent l’objet d’un suivi régulier, au moins une fois par an. » Le dépistage et la surveillance de la fonction rénale sont d’autant plus nécessaires qu’il existe des traitements qui permettent de ralentir l’évolution de la maladie. « Les bloqueurs de l’angiotensine, prescrits contre l’HTA, permettent de réduire la protéinurie, mais ils doivent être utilisés avec précaution, notamment en cas de stade avancé de la maladie rénale », précise le Pr Zaoui.

Une seconde famille, celle des inhibiteurs du SGLT2, est récemment arrivée sur le marché en France. Initialement indiqués contre le diabète de type 2, ces médicaments ont également un effet protecteur contre les maladies cardiovasculaires et rénales. « C’est une vraie révolution thérapeutique, ajoute le Pr Zaoui. Ces médicaments, qui inhibent le transporteur du glucose rénal SGLT2 présent dans le rein, facilitent son élimination par les urines. »

Dépister tôt, donc, pour traiter plus tôt et freiner la dégradation de la fonction rénale. Pour le Pr Zaoui, « c’est une urgence de santé publique, alors que près de 6 millions de Français(1) souffrent d’une maladie rénale chronique et que beaucoup l’ignorent ».

La mobilisation contre la maladie rénale chronique passe par une information plus efficace des professionnels de santé de premier recours, mais également par une sensibilisation du grand public, qui ne doit pas hésiter à en parler avec les médecins.

Pierre Mongis

1) Atlas de l’insuffisance rénale chronique terminale en France. Institut de recherche et de documentation en économie de la santé (Irdes) – Agence de la biomédecine.

Article extrait du dossier Grand Angle spécial Maladies rénales réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 10 mars 2022.

Photo : DR