Pr Olivier Ziegler, copilote de la feuille de route Obésité (2019-2022).
L’obésité est une maladie chronique à part entière. Multifactorielle, associée à de nombreuses comorbidités, elle appelle à une prise en charge centrée sur la personne, au long cours, portée par des équipes pluriprofessionnelles. L’arrivée de nouveaux médicaments ne doit pas nous détourner de la stratégie principale : accompagner le patient, amené à modifier ses comportements et habitudes de vie. L’éducation thérapeutique du patient (ETP) reste plus que jamais un enjeu clé, car elle permet de renforcer les compétences psychosociales dans leurs trois dimensions : cognitive (comprendre, donner du sens), émotionnelles (identifier et gérer ses émotions) et relationnelles (développer des liens sociaux), indispensables à un « engagement vers le changement ». L’objectif principal est de « vivre le mieux possible », trouver un nouvel équilibre… Nous parlons de « médecine narrative » : loin de conseiller, de recommander et plus encore d’obliger, il faut savoir écouter le patient, l’encourager à raconter son histoire et son rapport à l’alimentation, l’inciter à proposer lui-même des objectifs réalisables. Ce cheminement difficile demande du temps, des moyens et des compétences plurielles, pour que se développent sentiment d’efficacité, lâcher-prise, pouvoir d’agir, voire résilience, et acceptation menant à une espérance réaliste. Les parcours de soins gradués recommandés par la Haute Autorité de Santé devraient être accessibles à tous, avec l’appui de professionnels formés et rémunérés à la hauteur de leur implication. Actuellement, en dehors des centres spécialisés, l’ETP dans l’obésité n’est pas remboursée. C’est une limite majeure, nos patients appartenant souvent à des catégories socio-professionnelles défavorisées. Une réelle prise en compte de cette pathologie évolutive, coûteuse pour la société et stigmatisante pour les patients semble incontournable !
Article extrait du dossier Grand Angle spécial Obésité réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 5 mars 2024.
