Le ministère de la santé veut réformer la tarification des soins dentaires pour améliorer l’accès aux soins. Mais la nécessité d’une réforme va au-delà des seules questions financières.
« Reconquérir la prise en charge des soins dentaires pour les rendre plus accessibles pour tous. » Tel est, dans le dossier de presse du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, l’un des slogans affiché par le ministère de la santé en termes d’accès aux soins. Pour cette ultime « croisade » de Marisol Touraine, qui a fait de l’accessibilité aux soins la pierre angulaire de son action durant cinq ans, il est question de mettre en pratique une vieille recette jamais achevée : revaloriser les soins conservateurs et limiter les dépassements d’honoraires sur les actes à entente directe.
Concrètement, le PLFSS prévoit une enveloppe supplémentaire de 200 millions d’euros pour la hausse des tarifs des soins conservateurs. En contrepartie, les prix des prothèses dentaires seront plafonnés. Alors que les syndicats professionnels sont en cours de négociation avec l’assurance-maladie pour un nouvel avenant ajouté à la convention signée en juin dernier, le gouvernement met la pression. Il a en effet fait voter un amendement précisant qu’à défaut d’un accord avant le 1er février 2017, c’est un « arbitre » qui définira le niveau des plafonds imposés pour les prothèses. Une décision qui a bien entendu provoquée la colère unanime des syndicats dentaires.
Pourtant, ces organisations professionnelles se disent prêtes à accompagner une « réforme en profondeur » du financement des soins dentaires. En septembre, la Cour des comptes y consacrait un chapitre entier de son rapport annuel sur la Sécurité sociale. Avec un constat sévère : selon l’institution, à défaut de parvenir à encadrer le secteur, les pouvoirs publics l’ont laissé « déraper ». Au point que l’inflation des prix des soins prothétiques, mais également celle des dépassements d’honoraires sur la part remboursée, ont provoqué une augmentation des cas de renoncement aux soins. Plus de 17% déclaraient être dans cette situation en 2012.
En octobre, une enquête de la DREES proposait un nouvel éclairage, cette fois à l’échelle de l’Europe et de l’OCDE. Là, les résultats sont plus contrastés. Le renoncement aux soins ne concernerait que 9% des patients, un chiffre néanmoins plus élevé que la moyenne globale (6%) et celle de l’Union européenne (7%). En termes de consommation, le taux de consultation est de 1,3 en France, conforme à la moyenne du continent. Sur le plan de la démographie, l’hexagone est également à l’équerre, avec 64 praticiens pour 100 000 habitants. Enfin, côté reste à charge, l’étude note qu’il est élevé dans l’Europe des 15, avec 39% en moyenne. Ces données montrent que la situation française n’a rien d’exceptionnelle. En attendant, la profession ne renonce pas à s’interroger, comme l’illustrent le Grenelle de la sanré bucco-dentaire en janvier dernier, et la publication du Livre blanc de l’Ordre des chirurgiens-dentistes, avec 23 propositions concrètes.
Pierre Mongis