Les stratégies de prise en charge du VIH permettent aujourd’hui de mieux vivre, même s’il faut encore améliorer la prévention des risques et le dépistage précoce pour les populations les plus exposées.

Avec près de 173 000 personnes touchées, en 2020* le VIH reste encore et toujours une priorité de santé publique en France, même si l’amélioration des traitements permet de chroniciser la maladie chez une grande majorité de patients. « Beaucoup de progrès ont été réalisés en trente ans, constate le Dr Laurence Slama, infectiologue à l’Hôtel-Dieu à Paris. La prise en charge de la maladie par des traitements plus efficaces, simples et mieux tolérés offre aux patients atteints une espérance de vie comparable à la population générale. Cependant, on dénombre encore trop de nouveaux cas par an, ce qui démontre la nécessité de renforcer les mesures de prévention par le dépistage et le traitement précoce, en ciblant notamment les catégories les plus à risque.  »

Les infectiologues n’hésitent pas à parler d’ « épidémie cachée », alors que le diagnostic d’infection par le VIH n’a pu être établi, en 2020, que pour 4 800 personnes. «  En 2020 et 2021, il y a certes eu moins de cas déclarés, mais cela s’explique en grande partie par les mesures de distanciation sociale, par l’activité de dépistage de la population française et par l’accès aux soins des personnes les plus démunies qui ont été ralenties à cause du Covid-19 », relève le Dr Slama. Parmi les motifs de préoccupation des spécialistes, le Dr Slama évoque « le fait que 30 % des patients sont dépistés tardivement, avec un taux de CD4 inférieur à 200 ou au stade du sida ».

On dénombre encore trop de nouveaux cas par an, ce qui démontre la nécessité de renforcer les mesures de prévention par le dépistage et le traitement précoce, en ciblant notamment les catégories les plus à risque.

Dr Laurence Slam

Ces retards au diagnostic ont des conséquences à la fois individuelles et collectives : non seulement les patients sont plus fragiles face aux multiples complications possibles, en raison de la baisse de leurs défenses immunitaires, mais le risque de transmettre une maladie dont on ignore être porteur est majeur. « La qualité de vie des patients est au cœur de nos stratégies de prise en charge, précise le Dr Slama. En particulier pour les patients séropositifs depuis plus de trente ans et qui ont dû prendre des traitements plus toxiques, avec plus d’effets indésirables que les thérapies actuellement disponibles. » Outre des comorbidités plus fréquentes, les effets du vieillissement sont souvent délétères pour ces patients et ils appellent à un accompagnement renforcé. Plus que jamais, les politiques de prévention doivent être soutenues et adaptées pour les différents publics concernés. C’est le cas notamment pour la population des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). « Il faut continuer à promouvoir le préservatif, qui représente la meilleure protection contre l’ensemble des IST. Il faut également bien expliquer le principe de la prophylaxie pré-exposition (Prep), qui consiste à prendre un médicament devant toute situation à risque. Il faut enfin rappeler aux patients le principe du “i = i” : un patient dont le virus est indétectable grâce aux traitements ne transmet pas la maladie. »

Enfin, de nouveaux progrès thérapeutiques, avec des traitements délivrés dans des délais de plus en plus espacés (une fois pas semaine, une fois tous les deux mois, et bientôt tous les six mois), permettent d’alléger encore la charge mentale des personnes atteintes par le VIH.

Jean-Christophe Labaume

* Source : Santé publique France


Article extrait du dossier Grand Angle spécial Sida réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 1er décembre 2022.

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