
Le groupe EssilorLuxottica s’engage dans un projet d’envergure qui portera la prise en charge de la myopie chez les enfants et les adolescents à un niveau inédit. Entretien avec Thierry Villette, Directeur du projet PREMYOM et Directeur des partenariats et de la diffusion scientifique chez EssilorLuxottica.
Pouvez-vous nous parler de la genèse du projet PREMYOM ?
Thierry Villette L’épidémie de myopie progresse depuis vingt ans, affectant plus de 30 % de la population française. Les projections sont loin d’être rassurantes, puisqu’il est estimé que, d’ici à 2050, plus de la moitié de la population mondiale en sera atteinte. Nous sommes face à une véritable problématique de santé publique. Plusieurs facteurs de risque expliquent la myopie : l’hérédité, le manque d’exposition à la lumière naturelle et notre mode de vie moderne, esclave des écrans sursollicitant notre vision de près. Le projet PREMYOM – Prise en charge et Ralentissement de l’Epidémie de Myopie par l’Optique Médicale – est donc né de la volonté d’intensifier le combat contre l’épidémie de myopie, en attaquant plusieurs nouveaux fronts : la compréhension des mécanismes biologiques rétiniens sous-jacents à l’efficacité des verres de freination, la génération de données cliniques spécifiquement occidentales et la compréhension de la variabilité de l’efficacité de ces verres thérapeutiques d’un enfant à l’autre. Ces trois sujets sont essentiels pour compléter les connaissances existantes et atteindre un nouveau niveau d’efficacité des solutions optiques à mettre à la disposition des patients et des ophtalmologistes. Les données cliniques pertinentes, jusqu’à présent essentiellement asiatiques, manquent cruellement en Occident, ce qui nous éloigne de la réalité du terrain. PREMYOM est un projet de grande envergure prévu sur cinq ans, inédit, très ambitieux et franco-français, qui bénéficie du soutien de l’Etat dans le cadre du plan France 2030.
Quels sont, plus en détail, les éléments de recherche du projet PREMYOM ?
L’ambition est de développer des solutions ophtalmiques très innovantes, permettant une prise en charge personnalisée des enfants et adolescents atteints de myopie évolutive. Les verres optiques actuels ont été développés sur la base d’hypothèses qui fonctionnent, mais il s’avère que nous ne comprenons que partiellement les raisons d’une variabilité d’efficacité d’un enfant à l’autre. Nous devons donc approfondir notre connaissance de la façon dont les verres optiques agissent au niveau de la rétine et identifier clairement le mécanisme biologique rétinien sous-jacent à l’efficacité thérapeutique. La mise au point de modèles prédictifs basés sur de nouveaux biomarqueurs va nous permettre de savoir quel équipement fournir à quel enfant, avec plus d’efficacité et moins de variabilité. Cette démarche s’apparente à de la médecine de précision et c’est tout à fait nouveau en ophtalmologie. Les techniques expérimentales mises en jeu sont complexes et il nous faut valider les hypothèses émises en clinique. Cela nécessite une approche holistique mobilisant et rapprochant différentes expertises techniques, cliniques et numériques, issues d’organismes de santé et de recherche ainsi que d’acteurs industriels de premier plan. Ainsi, pendant cinq ans, nous allons réaliser essais cliniques, recherches approfondies sur les mécanismes biologiques de la myopie, études observationnelles, exploratoires et interventionnelles, pour comprendre l’évolution de la myopie et ses processus physiopathologiques. Nous allons utiliser pour cela des lunettes connectées équipées de verres freinateurs, des modèles prédictifs de progression de la myopie, de la technologie du jumeau numérique, de l’intelligence artificielle (IA) et des instruments d’optométrie.

Vous évoquiez plus tôt l’approche holistique et pluridisciplinaire du projet PREMYOM, pourriez-vous nous présenter les acteurs du consortium ?
Le projet rassemble six acteurs : l’Institut de la Vision, l’Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild, l’Inria, InSimo, l’Institut Mines-Télécom et EssilorLuxottica.
L’Institut de la Vision fournit son expertise des rétines exvivo et de toute l’intégralité de la signalisation rétinienne sous l’influence d’un stimulus optique. Avec l’Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild, nous allons mener les études chez les patients et valider en clinique les biomarqueurs qui auront été évalués comme pertinents pour développer des solutions optiques personnalisées. L’Inria apporte son savoir-faire sur la modélisation d’organes et de fonctionnements biologiques ; ses mathématiciens vont nous aider à modéliser et développer des modèles prédictifs sur l’œil pour aboutir à un jumeau numérique d’œil myope. Avec sa maîtrise de la simulation biomécanique de l’œil, la start-up InSimo contribue de manière avantageuse au projet : cette dimension est très importante, puisqu’un œil myope s’allonge et donc se remodèle, mettant en place des forces de tiraillement qu’il faut absolument prendre en compte. L’Institut Mines-Télécom apporte l’infrastructure de plateformes de données massives pour que tous les acteurs du consortium agrègent leurs données et que l’on puisse faire tourner les modèles étudiés de façon unifiée. EssilorLuxottica est le chef de file industriel dans ce consortium et contribue au projet via son expertise dans la mise au point et la fabrication des verres de freination et du matériel optique et optométrique de pointe.
En conclusion de cet entretien, pouvez-vous nous donner quelques exemples de solutions qui seront mises à disposition des patients et des ophtalmologistes ?
A horizon 2029, nous serions en mesure de proposer aux enfants et adolescents atteints de myopie des verres optiques personnalisés, sur la base de paramètres particuliers liés à leur style de vie et à leurs données oculaires : biométrie et optique de l’œil, environnement lumineux, temps d’exposition aux écrans, temps passé en vision de près… Des montures connectées ainsi qu’un parcours patients spécifique avec un suivi plus fin de l’efficacité de leur solution optique viendront compléter cette offre. Autre solution pour les parents cette fois : un outil de télémédecine permettant de prendre à fréquences convenues une image de l’œil de leur enfant, à la maison, et de la transmettre à leur ophtalmologiste. Les médecins se verront proposer de nouveaux instruments de mesure des paramètres oculaires plus précis. Enfin, le projet va également proposer, nous l’espérons, des outils permettant aux ophtalmologistes de rationaliser leur temps, comme de l’aide à la décision thérapeutique. Les connaissances que nous aurons développées au travers de PREMYOM vont servir à toute la communauté des acteurs qui travaillent sur la myopie. C’est ainsi un vrai changement de paradigme qui verra le jour dans la lutte contre la myopie en France et dans le monde entier.
Sandrine Guinot-Mosetti
Verres de freination Essilor® Stellest® • une réponse concrète à la problématique de la myopie

Stellest® est une solution novatrice et esthétique non invasive permettant de corriger et ralentir la progression de la myopie chez l’enfant.
Stellest® fonctionne grâce à une technologie composée de microlentilles fortement asphériques. Cette constellation de microlentilles permet de créer un volume de signal de ralentissement à la croissance de l’œil, en amenant de la lumière en avant de la rétine périphérique de façon à diminuer le phénomène d’élongation du globe oculaire inhérent à la myopie. Les verres Stellest® ont fait leurs preuves : différentes études cliniques ont été menées pour vérifier leur efficacité.
Les résultats ont montré qu’en cinq ans* les enfants équipés de ce verre ont vu la progression de leur myopie ralentir en moyenne de 1,75 D par rapport aux groupes contrôles combinés équipés de verres unifocaux standard. Sur la même période, ces mêmes verres ont permis d’éviter plus de trois ans de progression de la myopie et d’allongement axial par rapport à des verres unifocaux standard. Aujourd’hui, on estime que le taux de pénétration des solutions de freination de la myopie est entre 10 % et 15 % en France (sur les myopes corrigés). Cela reste trop peu, et l’enjeu est de démocratiser cette solution de verres optiques non invasive qu’est Stellest® pour éviter que l’enfant n’ait une myopie trop forte à l’âge adulte. Il faut en effet agir le plus précocement possible, la progression de la myopie étant plus rapide dans l’enfance. Car les conséquences à long terme peuvent être sérieuses : décollement de rétine, cataracte précoce, glaucome, corps flottants, atteintes de la rétine maculaire et, dans les cas graves, perte majeure d’acuité visuelle voire cécité.
Sandrine Guinot-Mosetti
LE VERRE ESSILOR® STELLEST® EN CHIFFRES

Plus de 250 000 enfants équipés depuis le lancement en 2021 en France.
• 100 % des enfants porteurs adaptés en 1 semaine, dont 90 % en moins de 3 jours**.
• Les verres Essilor® Stellest® ralentissent la progression de la myopie de 67 % en moyenne**, par rapport aux verres unifocaux standard, lorsqu’ils sont portés 12 heures par jour.
• Une efficacité confirmée par les études cliniques depuis 5 ans*.
* Li X, et al. Myopia control efficacy of spectacle lenses with highly aspherical lenslets: results of a 5-year follow-up study. Eye and Vision. 2025;12, 10. https://doi.org/10.1186/s40662-025-00427-3
** Bao J, et al. Spectacle Lenses With Aspherical Lenslets for Myopia Control vs Single-Vision Spectacle Lenses: A Randomized Clinical Trial. JAMA Ophthalmol. 2022;140(5), 472–478.
Articles extraits du dossier Grand Angle spécial Myopie réalisé par CommEdition, parution dans Le Monde daté du 13 avril 2025